Une lumière franche et brutale comme l’hiver en a le secret. Le ciel nous fait le coup du gris, mais pas tant que ça : il y a du soleil, quelque part, qui frappe le fort Boyard et lui seul, la star sous les sunlights.
Fin février sur le lac de Bordeaux, à deux pas de la plage : deux grèbes huppés déambulent. Sont-ils en couple ? je l’ignore. Nous offriront-ils sous peu cette belle parade nuptiale pendant laquelle les deux oiseaux marchent sur l’eau ? je l’ignore tout autant. Les deux grèbes sont trop loin l’un de l’autre pour que la photo soit bonne. J’en choisis un seul. Le voilà :
Il existe un pays où les cartes d’identité sont valables 450 ans. Quelle économie ! Voilà un pays merveilleux ! Il faut quand même y regarder de plus près. Commençons par une de ces cartes d’identité, celle de Poulpo Mamoulex :
Poulpo, comme tous les membres de sa famille, mais aussi des familles Naoshi ou Manogo, sont des individus de plastique, constitués des déchets de nos plages et de plages plus lointaines. Voici Poulpo en pied (si je puis dire) :
Poulpo et d’autres sont actuellement rassemblés dans une boite d’exposition éphémère judicieusement placée à côté de la Maison écocitoyenne de Bordeaux, et ce jusqu’au 10 mars :
Cette exposition vise, on l’avait compris, à pointer du doigt la pollution des littoraux, et donc des océans, par les plastiques. Chaque individu créé a sa carte d’identité, et, si l’ensemble vise à sensibiliser à une cause ô combien importante, elle ne manque ni de poésie ni d’humour. Voici quelques uns des camarades de Poulpo :
Dernier mois de l’hiver météorologique, février prend des airs de printemps. Les fleurs sortent un peu partout, notamment dans les zones boisées des parcs urbains. Les photos ci-dessous ont été prises hier dans l’agglomération bordelaise.
« L’hiver est fini », dit la dame qui, près de moi, entendait les grues passer sur la ville. L’hiver est fini, et c’est bien vite, me disais-je en constatant que la doudoune, quand il fait 20°C dehors, c’est un peu surdimensionné. Hiver ou pas, mi-février est là, et les grues, en petits groupes et en ordre dispersé, passent sur Bordeaux; bien vite pour ne pas se faire piquer la place au camping dans le grand nord-est lointain, là où il y a encore de la neige et des frimas.
Photos réalisées à Bordeaux les 13 et 14 février 2024
À chacun son bout de branche, mais tous sur le même arbre. Les aigrettes, tout comme les autres hérons et même cigognes, peut-être parce-que tout ce petit monde est de la même famille, ne nichent jamais bien loin les uns des autres, se rassemblent pour faire une pause entre deux temps plus actifs. C’est ainsi que les aigrettes peuvent se retrouver en bande dans le même bosquet, taches blanches sur le vert sombre des conifères en hiver.
On dit « LA » foulque, pas « LE », même si c’est tentant car on ne sait jamais, face au bec blanc de l’oiseau, si c’est madame ou monsieur. La foulque, donc. De son nom complet « foulque macroule ». La foulque déambule sur la mare et génère des ronds sur l’eau du marais en hiver.
S’il est fréquent de voir l’écureuil en train de porter sa noix ou noisette dans sa gueule, il est plus rare de l’observer en train de filer l’écorce. L’écorce de l’arbuste est en effet soigneusement décollée puis tirée fil après fil par le petit animal, qui en fait une pelote dans le but de tapisser douillettement le nid qui accueillera bientôt ses enfants.
Fin janvier, quand les températures méridiennes fleurtent avec les 18°C, et que les quidams ne savent plus s’il faut porter une doudoune ou déambuler en débardeur, l’écureuil, lui, gloutonne.
Allant de branche en branche récupérer les derniers fruits à coque, il est prêt à toutes les acrobaties.
Jardin public sur le coup de midi. Un chat dit « de gouttière » tente une pause sur les herbes sèches d’une plante à grandes tiges. Lorsque je m’approche, il ouvre les yeux, puis se rendort. Chat du quartier en mode sieste, qui quitte son nid dans le quart-d’heure qui suit.
C’était au tout début du mois, quelque part sur l’île d’Oléron, lors d’un retour de balade. Du vert sur fond vert, je ne perçois rien, mais l’ami qui nous accompagne pointe du doigt le petit batracien. Il avait l’œil, lui. Le lendemain, je suis retournée au même endroit, scrutant la même feuille. Mais rien. Il y avait du vent, trop de vent, et l’animal était ailleurs.
Une plage océane du sud de l’île d’Oléron. Plage de sable fin. Vent. Beaucoup de vent. Bois flotté en pagaille, bois tout court, laisses de mer, fatras habituel du fond du Golfe de Gascogne. Au milieu du bric-à-brac maritime émerge une sculpture en bois, une sorte de moaï de petite taille, un totem sérieux comme un pape, droit comme un « i » dans cet espace désordonné.
Il a un peu neigé, disons neigeouillé, toute la journée. Cela a suffit pour que tous les marmots, y compris les plus grands, raclent les amas floconneux sur les voitures pour se lancer dans des batailles de boules de neige à deux balles. Pas plus, par manque de munitions, mais c’était festif et joli, ce petit peu de neige, surtout sur les branches des arbres des parcs et des jardins. Les plus audacieux des humains de passage se sont même lancé dans le bonhomme de neige, quitte à y mettre toute la neige présente sur plusieurs hectares. Puis la neige a continué de tomber, certes, mais sans plus du tout tenir au sol qui avait repassé la barre du O°C fatidique. Patouille partout. Il ne faut pas que ça gèle cette nuit, sinon c’est patinoire garantie.
Photos réalisées à divers endroits de l’agglomération bordelaise le 10 janvier 2024
Une des dernières balades de 2023, un jour de vent, de houle de noroît. Ça vente, ça bouge. C’est beau une vague qui shoote dans un fort, fut-il Boyard, comme un rugbyman qui transforme l’essai. Le fort prend sa vague, encore et encore. Dimanche 31 décembre 2023 sur le coup de 15 heures.
Photo réalisée sur la commune de St-Georges-d’Oléron
C’était à la toute fin de décembre, autant dire l’année dernière. Une balade au Château d’Oléron, quelques minutes avant la pluie. Et cette lumière d’orage sur la citadelle.
Un moment furtif, un passage, quelque chose mi-bleu mi-orange qui passe au loin et se fige. Ou plutôt se pose. Le temps du zoom, l’oiseau est sur la carte mémoire : martin-pêcheur.
Un martin-pêcheur sur l’île d’Oléron – Décembre 2023
C’est un chemin tranquille, quoique fort humide, dans un marais oléronais. Un chemin que traverse un faisan, qui se pose dans le champ d’en face, faisant fi des coups de fusil que l’on entend au loin.
Photos réalisées sur l’île d’Oléron fin décembre 2023
La pluie jusqu’à ce jour perturbe peu le Bordelais, son gène de cagouille s’exprimant avec aise sous l’abat d’eau et le crachin. Mais parfois, quand même, quand le temps de chien ne sied plus à la cagouille tant il mouille en continu, le Bordelais se réfugie dans les intérieurs, cocooning et canapé. C’est ainsi que bizarrement les quais sont subitement aussi vides que le cerveau d’un fan de Zemmour, et cela surprend la Bretonne de l’étape, cagouillarde de compèt’, et qui a très bien intégré toutes les subtilités du climat aquitain.
J’attends au tournant le quidam qui me sortira qu’il pleut toujours en Bretagne. Parce-que s’il veut savoir ce que c’est la pluie tout le temps, c’est pas en Bretagne qu’il faut qu’il aille, c’est à Bordeaux. Même qu’aujourd’hui, en soirée, on a eu crachin, spécialité pourtant réputée bretonne. On a donc eu crachin, mais cela n’empêche pas d’aller voir le sapin de verre de Noël devant la cathédrale, et de trouver qu’il est plutôt joli, même tout dégoulinant. Et puis quoi, les Bretons et les Bordelais le savent bien, que le crachin c’est de la pluie qui mouille pas.
Ce n’est pas parce-qu’enfin nous avons eu ciel bleu aujourd’hui qu’il faut oublier les pluies des jours d’avant, les flaques en masse, les ruisseaux de jardins, les rigoles de trottoirs, les fleuves de caniveaux. A moins d’être une grenouille ou d’avoir des gènes de poissons, l’humain de base finit tôt ou tard par râler face à une telle adversité. Il mouille grenouille, et comment veux-tu que je traverse mon parc habituel pour aller besogner sans me détremper les pieds ? Tirant des bords sur le chemin flaqueux, l’humain improvise et se mouille.
Photo réalisée à Bordeaux au début du mois de décembre 2023
Il y a des années à grues et des années sans beaucoup de grues. Je parle des grues descendantes, celles qui filent vers le sud, loin des frimas du grand septentrion, et qui passent sur ma tête fin novembre début décembre. Cette année à grues commence timidement. C’est une petite année à grues, ou alors elles sont en retard, ou alors elles passent plus à l’est, ou alors je deviens sourde et ne les entends plus.
Des grues au-dessus de mon jardin – Agglomération bordelaise – Début décembre 2023
Aujourd’hui enfin la pluie a cessé, mais tout déborde encore, les trottoirs sont des pédiluves, et le ciré s’égoutte dans le garage, trempé de chez trempé après une semaine d’abats d’eau et de pluie constante. Mais Bordeaux sans eau ne serait pas Bordeaux …
Alors donc il fallut traverser les rideaux d’eau, baisser le museau vers les flaques, capuche sur la tête et pantalon en détrempe totale.
Il a fallu franchir les obstacles, les oueds aussi soudains qu’urbains.
Il a fallu vaille que vaille se dire que cela n’avait pas d’importance, que les chaussures étaient à peu près étanches, et qu’un bon feu de cheminée ragaillardirait les âmes détrempées une fois la journée terminée.
Photos réalisées au Jardin Public de Bordeaux le 1er décembre 2023
Il y a quelque chose d’impressionnant dans cette construction réalisée avec force salive et mandibule d’un insecte commun. Les frelons bâtissent des nids gigantesques, dignes des pyramides ou de la muraille de Chine, de manière ordinaire, banale. Impressionnant, disais-je. Et, à chaque fois, je reste scotchée devant une telle prouesse.
Chaque automne le même plaisir revient, que j’attends avec impatience : le moment où le ginkgo biloba passe du vert au jaune. Cet arbre est fréquent dans de nombreux parcs de l’agglomération bordelaise, mais j’observe toujours en particulier celui qui borde la petite rivière du Jardin Public. Un phare à lui tout seul. Un soleil dans la grisaille de novembre.
Il y eut Céline, puis Ciaran, on attend Domingos. Un bel automne tempétueux à souhait ! Mais entre les vents forts et les abats d’eau, le calme revient. Les paysages et les oiseaux reprennent leurs places et c’est joli, comme ces chardonnerets dans le sud de l’île d’Oléron après la tempête Céline :
Dans le même temps les oies sont arrivées pour hiverner :
Quant aux cigognes, qu’il pleuve ou qu’il vente, elles restent fidèles au marais, prenant des forces pour refaire le nid en fin d’hiver et élever, au printemps, les petits qui tenteront l’aventure de la migration en été :
Photos réalisées sur l’île d’Oléron, fin octobre et début novembre 2023
Pleine mer. Ce n’est qu’un coeff 103 (le max théorique est de 120), mais la pleine mer prend la pleine mesure de ses capacités. Les cabanes d’artistes, ex-cabanes ostréicoles, du Château d’Oléron, ont les planchers dans l’eau. Le piéton, curieux, photographie, mais aussi calcule son parcours pour éviter d’avoir de l’eau aux chevilles.
Photo réalisée pile à marée haute au Château d’Oléron le 28/10/23